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[EXP] Ardelaine : un projet coopératif devenu moteur de développement local à partir de la transformation de la laine.

Dossier(s) : (Agri)-tourisme et patrimoine rural, Systèmes alimentaires locaux, Entrepreunariat rural et diversification d’activités

Type : Expérience réussie

Date de rédaction: 20 août 2009

Auteur(s) de cette fiche : Marina GUEDON

Organisme(s) : Ardelaine

Texte :

Contexte

Nous sommes à St Pierreville, petit village ardéchois, situé à 500m d’altitude, entre la montagne ardéchoise et la vallée du Rhône. Cette région appelée « Les Boutières » est formée de nombreuses vallées qui s’articulent autour de la rivière de l’Eyrieux. Ses paysages de pentes ont été façonnés par l’homme en milliers de terrasses car longtemps ce pays a vécu en autarcie. La polyculture vivrière, l’élevage expansif des moutons, la soierie ont fixé les enfants au pays jusqu’à la fin des années 60. Puis les villages se sont progressivement vidés, au rythme de l’urbanisation de la France d’après guerre. Actuellement, le châtaignier y domine aux côtés de l’élevage de moutons et de la production de petits fruits.

Acteurs

C’est au plus fort de la déprise que débute l’histoire d’Ardelaine, à la fin des années 70. Une poignée de jeunes idéalistes se demandent comment concrétiser leurs rêves : vivre ensemble d’un travail qui ait un sens, loin de la fureur des villes et libres de la dictature du profit. La filature de Saint Pierreville, fermée depuis les années 60, va leur permettre de mettre en pratique leur théorie sur la vie et le travail collectif.

L’équipe décide de mutualiser les revenus gagnés à droite à gauche pour réhabiliter le site et à terme, le travailler logiquement la laine, principale ressource du pays. Après quelques années d’efforts, naît en 82 la Société coopérative Ouvrière de Production (SCOP) Ardelaine (contraction d’Ardèche et de laine). Ils sont alors 15 associés et 1 salarié. Aujourd’hui, l’entreprise autogérée distribue des salaires égaux à ses 25 salariés dont 18 sont aussi coopérateur et 10 participent au collectif de vie.

Activités

Un projet intégré, créateur d’emplois et lié au territoire

La SCOP a su concevoir un projet diversifié reliant toutes les étapes de la filière dans une structure commune : tonte des moutons, cardage des laines, fabrication de matelas et articles de literie, tricotage et confection de vêtements et commercialisation par correspondance, sur les foires, salons et magasins bio mais également sur place. Elle a su franchir bien des obstacles et se développer étape par étape, en créant en moyenne un emploi par an. Pour relancer l’industrie de la laine, il était indispensable de s’associer aux éleveurs du pays afin d’obtenir la matière première que la SCOP ne produit qu’en petites quantités. La présentation d’un projet attractif et cohérent Ardelaine, misant sur la qualité, humaine et environnementale a été un des éléments différentiateurs. Les prix de vente qu’elle pratique qui lui permettent d’acheter la laine aux éleveurs à un prix supérieur à celui du marché, de donner la priorité à l’emploi sur l’automatisation, de financer la protection de l’environnement et de développer l’économie locale. Ardelaine est ainsi devenue au fil des années le premier employeur de la région. 300 éleveurs de l’Ardèche et de la Haute-Loire ont adhéré à une charte de qualité garantissant à Ardelaine 40 tonnes de laine “ Bio ”, qu’elle transforme après avoir tondu de 50 000 montons, principalement de la race locale de la Blanche du Massif Central. Aujourd’hui l’entreprise projette d’intégrer sur le site l’activité de filage de la laine, la seule étape du processus qui leur échappe.

Une activité respectueuse de l’environnement

Dans toutes ses activités, Ardelaine veille à préserver au mieux l’environnement. Les éleveurs signent une charte de qualité garantissant l’absence de traitement toxique sur les toisons. La laine est lavée avec du savon biodégradable. Les eaux usées sont retraitées dans une station d’épuration agréée. Tout au long de la fabrication, la laine ne subit aucun traitement chimique (anti-feutrage, anti-mite, carbonisage…). De plus, les couettes et les oreillers sont enveloppés de tissu de coton égyptien, issu de l’agriculture bio-dynamique. Quand à sa consommation d’énergie, l’entreprise valorise au mieux les ressources du site grâce à une centrale hydroélectrique.

Des prix justes pour une économie solidaire et équitable, tant en zone rurale qu’urbaine

Ardelaine en tant que Société Coopérative de Production, est une structure de l’économie sociale et solidaire. L’échelle de salaires est de 1,2 (écart entre les salaires minimum et maximum) au sein de l’entreprise. Si l’entreprise fait des bénéfices, ceux-ci sont répartis ainsi :

  • 45% mis en réserve, pour la sécurité et la pérennité de l’entreprise,

  • 45% distribués aux salariés (participation),

  • 10% attribués aux associés (dividendes). L’impact social d’Ardelaine s’étend cependant au-delà du canton de St Pierreville .

Bien que faisant le pari de la ruralité, Ardelaine installe en 1986 dans la ZUP de Valence la partie confection de ses ateliers. L’installation répond bien sûr à une logique industrielle (accessibilité des machines à coudre pour leur maintenance) mais ne s’y limite pas. Là encore, au cœur du projet valencien, il y a l’envie, sinon le besoin de ne pas se replier sur soi, et après avoir joué la carte de la ruralité, d’encourager un urbanisme plus humain. Ardelaine crée donc une association et joue un rôle important dans les dynamiques du quartier. L’association sert également de lieu de recrutement à l’entreprise.

Un projet culturel et pédagogique, qui transmet son savoir faire aux générations futures

Les délocalisations massives dans le domaine textile et la déstructuration du travail de la laine en France laissent penser que de nombreux savoir-faire vont disparaître. L’envie de transmettre leur savoir-faire mais également leur expérience de travail collectif a conduit les coopérateurs d’Ardelaine à construire un petit écomusée, le Musée vivant de la laine et du mouton. Crée en 1991 sur le site, il transmet l’histoire et l’évolution des métiers de la laine du néolithique à nos jours. Les itinéraires et journées porte-ouverte proposés aux familles et scolaires complètent ce travail de transmission.

Dans un autre domaine, Ardelaine participe aussi à des formations visant à la transmission de la culture coopérative en partenariat avec d’autres acteurs de l’économie sociale et solidaire réseau REPAS (Réseau d’échanges et de pratiques alternatives et solidaires.) et Ecole de la Coopération.

Partenariat et développement local

En plus de sa promotion à travers divers organismes de tourisme, culture et patrimoine (Ardelaine est notamment labellisée « entreprise du patrimoine vivant » par l’Etat), la coopérative fait venir 30 000 visiteurs par an en partenariat avec l’association locale “ la maison du Châtaignier ”. Ces derniers découvrent le passé et présent de la laine ardéchoise (et les infinis usage de la châtaigne), ils achètent ensuite des pulls ou des matelas dans la boutique et se posent à midi au restaurant du village.

Perspectives

Afin d’améliorer les conditions d’accueil et renforcer son attractivité touristique, la coopérative a pour projet d’ouvrir un restaurant sur son site, au concept original, puisqu’il proposera uniquement des produits issus de l’agriculture et de l’élevage local, comme les châtaignes, les myrtilles, le fromage, les agneaux etc…et disposera également d’un atelier de transformation. Aucun de ces produits ne devra se trouver au-delà des 50 km de Saint-Pierreville. Cette initiative, conçue en partenariat avec la Communauté de communes dans le cadre d’un « Pôle d’excellence rurale » est soutenue par l’Union européenne, l’Etat, la Région et le Département. Elle devrait voir le jour en 2010, dans des locaux en cours de construction.

Notes :

Source:

www.ardelaine.fr

autogestion.coop/spip.php?article16

Informations :

Niveau d’intervention : Régional

Mots-clés : économie locale, circuit de proximité, partenariat local, transformation locale de produits agricoles, artisanat, initiative locale, transformation de la laine, économie sociale et solidaire, tourisme durable, patrimoine rural, sauvegarde du savoir, entrepreunariat rural, création d’emploi, agriculture biologique, clients solidaires, prix juste, projet de territoire, produits à plus forte valeur ajoutée

Lieux : France

Acteurs : société coopérative et participative (SCOP)

Méthodes : partenariat, animation