Un recueil de savoirs sur la récolte de semences de prairies naturelles dans le Massif Central, France
Dossier(s) : Savoirs agro-écologiques locaux
Type : Expérience innovante
Date de rédaction: 15 janvier 2021
Organisme(s) : GEYSER (Groupe d’études et de services pour l’économie des ressources)
Résumé :
Situé en zone de moyenne montagne (800-1300m), le territoire de Saint-Flour Communauté est fortement marqué par la présence des prairies permanentes qui occupent plus de 70% de la surface agricole : elles sont donc une composante essentielle du paysage.
Or, le changement climatique et l’artificialisation des milieux naturels par certaines pratiques agricoles remettent aujourd’hui en question la résilience et la durabilité des systèmes d’élevage basés sur l’herbe.
Le projet a pour but de restaurer des prairies naturelles à flore autochtone de manière à ce que ce patrimoine floristique naturel se maintienne et gagne de nouveaux espaces.
Dans cet objectif, un groupe d’éleveurs et un collectif de partenaires expérimentent la collecte de semences de prairies naturelles et leur utilisation en remplacement des semences du commerce.
Texte :
Un projet de recueil de semences locales en partenariat avec de multiples acteurs
C’est en 2012 que l’idée de tester de nouvelles méthodes de collecte de semences a émergé. En effet, un agriculteur de l’Aubrac, avec l’appui du CEN Auvergne, souhaitait produire sa propre semence de prairies naturelles à l’aide d’une moissonneuse-batteuse. Le soutien financier de la communauté de communes du Pays de Saint-Flour Margeride poursuivre et d’élargir ces expérimentations de 2016 à 2019.
Ce projet est rendu possible par l’étroite collaboration entre un vingtaine d’agriculteurs engagés dans les expérimentations et différents partenaires : l’établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole (EPLEFPA) des Hautes Terres, le Conservatoire d’espaces naturels (CEN) d’Auvergne, le Conservatoire Botanique National du Massif Central (CBNMC), l’association Geyser, l’Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement (INRAE), l’association Les Tracteurs de la Vallée du L’Ander et l’ensemble scolaire Sacré Cœur (Saint-Chély-d’Apcher).
Comment le recueil de savoirs et l’expérimentation ont-ils été menés et valorisés?
Sur le territoire de Saint-Flour Communauté comprenant la Planèze de Saint-Flour, la Margeride et l’Aubrac, des éleveurs ont mené des expérimentations de récolte et de semis de graines de flore prairiale native, main dans la main avec des partenaires techniques.
Il ne s’agit pas d’un dispositif à grande échelle mais d’une expérimentation locale sur plusieurs parcelles privées et en laboratoire (analyse de la composition du mélange récolté, test de germination).
L’introduction de cette nouvelle pratique pour les agriculteurs a fait émerger des savoirs nouveaux, en perpétuelle construction.
Dans le cadre de ce projet, l’association Geyser va à la rencontre des agriculteurs pour collecter les savoirs importants selon eux dans le cadre de cette expérimentation mais aussi leur appréciation de la démarche.
“Cette dynamique collective, les échanges au sein du groupe d’agriculteurs et le travail d’experimentation vont contribuer à mobiliser des savoirs existants et en créer de nouveaux. Notre travail est d’identifier et caractériser ces savoirs pour les mutualiser au sein du groupe d’agriculteurs qui particient au proje, les croiser avec les observations des partenaires scientifiques et techniques. Et ensuite que cela puisse être diffusé plus largement« , explique Jean-Luc Campagne
Ces retours d’expérience sont précieux car ils permettront à d’autres agriculteurs d’appréhender comment mener la démarche: choisir sa prairie donneuse ; définir la date de récolte puis la méthode de collecte la plus adéquate ; conserver les semences collectées puis les semer sur sa parcelle receveuse ; et enfin savoir pérenniser sa prairie implantée.
L’ouvrage “Restaurer des prairies naturelles - Recueil de savoirs pour produire et utiliser des semences prairiales” se nourrit de ces expériences et de ces connaissances : il propose un fil conducteur autour des étapes clés de la production et l’utilisation de semences issues de prairies naturelles, enrichies de témoignages d’éleveurs.
Cette publication a pour objectif principal de rendre autonomes les agriculteurs souhaitant pratiquer la récolte et l’implantation de semences paysannes de prairies naturelles locales
Dans quelle mesure ces initiatives et savoirs peuvent contribuer à apporter des réponses aux défis actuels?
Les prairies naturelles présentent de multiples atouts pour répondre aux enjeux environnementaux et économiques de l’élevage en moyenne montagne:
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économie en intrants: peu d’interventions mécaniques car l’implantation est pérenne
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résilience aux aléas climatiques: la génétique est adaptée aux conditions pédoclimatiques
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réservoir de biodiversité: les prairies du territoire sont composées d’une flore très diversifiée dont la génétique s’est adaptée aux conditions locales
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augmentation de la valeur ajoutée des produits: la flore est source de fourrages équilibrés, de bonne qualité nutritionnelle permettant de s’inscrire dans des démarches de valorisation spécifique
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création de paysages typiques et régulation du climat (stockage de carbone)
Pour ces raisons, la volonté est de maintenir ces surfaces sur le territoire en faisant valoir les bénéfices qu’apporte l’intégration des différents types de prairies naturelles dans les systèmes agricoles montagnards.
Savoir local: un exemple
La souplesse d’exploitation : Jean-Pierre C. ne tarit pas d’éloges sur la prairie qu’il destine à la production de semences : « J’ai gardé une des meilleures parcelles, la plus régulière quelles que soient les conditions météo, l’une des plus stables dans son fonctionnement. C’est celle qui a le plus de gesses et de vesces, beaucoup de légumineuses. C’est une parcelle qui fait du rendement et de la qualité quel que soit le stade d’exploitation précoce ou tardif. Elle s’adapte aussi au pâturage. Elle a (…) une souplesse d’exploitation terrible [Jean-Pierre C. privilégie sur cette parcelle une exploitation tardive]. Grâce à son fonctionnement, elle a une bonne capacité à se régénérer par rapport au problème des rats taupiers [l’utilisation tardive favorise le grainage]. »).
Les bienfaits de l’alternance: Pour Jean-Pierre C. l’alternance fauche / pâturage augmente la diversité de la flore et la qualité des herbages : « Celui qui peut faucher l’ensemble de sa ferme, il a intérêt à alterner les pâturages et les prés de fauche. Ça sélectionne moins la flore, parce qu’il y a des espèces qui aiment bien la fauche, il y a des espèces qui n’aiment pas du tout le pâturage, d’autres, qui à l’inverse, ne seront que dans les pâturages. Comme une prairie de fauche, c’est toujours un meilleur herbage, un meilleur rendement, une meilleure précocité, si tu peux alterner, c’est top. » Grâce à cette alternance, on diminue également les risques sanitaires pour les animaux qui pâturent.
Notes :
Source and contact
Information gathered at:
www.inrae.fr/actualites/recueil-savoirs-produire-semences-locales-nos-prairies
Contact: Jean-Luc Campagne (GEYSER)
Available on Forum Synergies’ website: www.forum-synergies.eu/bdf_fiche-experience-243_fr.html
Télécharger :
- vf_-_recueil_de_savoirs.restaurerdesprairiesnaturelles-4.pdf
- fs_epe_prairies_fr_valorisation_forum_synergies_fin-2.pdf
Informations :
Niveau d’intervention : Local
Mots-clés : montagne, amélioration de la biodiversité, Savoirs Ecologiques Paysans, sauvegarde du savoir
Lieux : France
Acteurs : centre/institut de recherche, paysan, enseignant, municipalité
Méthodes : recueil de savoirs